William Bayiha

Transformer sur place les matières premières pour combattre l’immigration clandestine ?

 

Jeune homme au travail.
Très peu d’emplois à long terme naissent des investissements en Afrique. Cela conduit notamment à l’immigration clandestine.

La question migratoire a été au cœur du sommet Afrique-Europe qui s’est tenu à Abidjan, en Côte d’Ivoire. Et dans les discussions, le chômage de masse a été identifié comme le principal mal qui ronge le continent et pousse la jeunesse à partir. En évoquant la question du chômage, on tombe sur des chiffres qui poussent à réfléchir…

Ce texte a été diffusé dans le cadre de la Chronique Business sur Africanews.

L’immigration des Africains vers l’Europe a été une idée fixe lors du sommet d’Abidjan. Et en filigrane des discours des dirigeants européens et africains, nous avons retrouvé la certitude selon laquelle les migrants prennent d’assaut la Méditerranée pour fuir la pauvreté et le chômage en Afrique.

Pauvreté-chômage-Afrique, triptyque qui fait sens dans tous les débats actuels sur l’immigration.

Face à cette certitude, je me suis intéressé aux chiffres du chômage en Afrique pour savoir, comme c’est souvent suggéré, si le départ pour l’Europe est dû à une sorte de désœuvrement sur le continent.

Et selon les tendances 2017 de l’Organisation internationale du Travail intitulées « Emploi et questions sociales dans le monde », on peut voir que le chômage en Afrique touche 8 % de la population en âge de travailler et que ce chiffre est stable depuis 2016.

En regardant de plus près, on note que la situation de l’emploi proprement dite est meilleure en Afrique subsaharienne, Afrique du Sud – où le chômage culmine à 25 % – mise à part. Au regard du discours développé sur l’oisiveté des Africains, ces chiffres ont effectivement de quoi étonner.

C’est quoi un chômeur, au fait ?

Dire que seuls 8 % de la population africaine connaît le chômage pourrait intriguer ceux d’entre vous qui vivent en Afrique et qui continuent à voir de nombreux jeunes ne pas prendre le chemin du bureau ou d’un quelconque chantier.

C’est l’occasion pour moi de rappeler que selon le Bureau international du Travail, être sans emploi, être un chômeur, signifie trois choses.
  • Primo : ne pas avoir travaillé au moins une heure durant une semaine de référence.
  • Secundo : être disponible pour prendre un emploi dans les 15 jours.
  • Tertio : avoir cherché activement un emploi dans le mois précédent…

Ce que vous observez dans les rues, c’est en fait le symptôme ce qu’on appelle les emplois vulnérables.

Et le pourcentage en est élevé en Afrique en général. En Afrique subsaharienne près de 7 personnes sur 10 se retrouvent dans en situation de vulnérabilité.

Lorsqu’on parle d’emplois vulnérables, on évoque des emplois précaire. Ceux-ci ne donnent pas souvent lieu à des protections sociales et sont particulièrement soumis à l’insécurité du marché de l’emploi.

À noter également : sur les 70 % de la population touchée par l’emploi précaire en Afrique subsaharienne, les 2/3 sont des jeunes.

L’immigration est due au manque d’emplois stables

Pour revenir à notre sujet, à savoir le sommet Afrique-Union européenne qui s’est tenu à Abidjan, j’aimerais réagir aux déclarations des chefs d’État qui annoncent qu’ils vont créer les conditions économiques pour retenir les jeunes sur le continent.

Je ne pense franchement pas que pas ce soit une question liée à la performance économique en tant que telle.

Le président de la Commission européenne Jean-Claude Junker a noté que la croissance économique en Afrique a été impressionnante durant la dernière décennie… mais qu’elle est insuffisamment inclusive. En d’autres termes, cette croissance ne profite pas à toutes les couches de la population. Je pense notamment aux jeunes et aux femmes.

Mais les femmes et les jeunes peuvent-ils réellement être impliqués dans l’organisation actuelle des économies africaines ? Je voudrais noter avec vous que le tissu productif africain est encore essentiellement tourné vers l’exportation des matières premières.

Avec des cours intéressants à l’exportation, les économies du continent ont profité de leurs croissances pour investir, parfois massivement, dans les infrastructures.

Des emplois ont été créés, mais cela a été des emplois qui ne duraient que le temps du projet de construction de la route, du pont ou du barrage.

Très peu d’emplois à long terme naissent de ces investissements. Pourtant, il faudrait 22 millions d’emplois stables chaque année en Afrique pour occuper les nouvelles générations qui arrivent sur le marché du travail.

Mais avec des économies extraverties à la balance commerciale largement déficitaire, difficile d’empêcher la main d’œuvre employée au gré des chantiers, sans garantie pour le lendemain, de suivre le chemin que prennent les matières premières, agricoles, minérales, halieutiques, qui ont du mal à être transformées sur place.


La surpopulation de l’Afrique est un mythe

Les Africaines font trop d’enfants et le défi de l’Afrique, pour se développer, est de réduire sa natalité. Voilà en quelques mots comment pourraient se résumer les récents propos du président français Emmanuel Macron. «Dans un pays qui compte encore sept à huit enfants par femme, vous pouvez décider d’y dépenser des milliards d’euros, vous ne stabiliserez rien», a-t-il observé alors qu’il répondait à une question lors d’une conférence de presse en marge du sommet du G 20.

Alors comme ça, l’Afrique serait trop peuplée ? L’idée en elle-même n’est pas nouvelle. Et depuis au moins les années 1970, des programmes de panification familiale se sont abattus sur le continent avec enthousiasme. Le discours est le même : il faut maîtriser l’explosion démographique en Afrique.

Mais moi qui vis en Afrique, je n’ai pas franchement l’impression de vivre dans un contexte de surpopulation étouffante. Cette surpopulation qu’une certaine élite occidentale et occidentalo-centrée essaie coûte que vaille d’inséminer dans nos cerveaux, je ne la sens pas m’astreindre.


Statistiques

La télévision et l’internet sont des vecteurs de mondialisation des idées. Ces canaux permettent à ceux qui comme moi font partie de la périphérie, de la marge du monde, d’entrevoir ce qui se passe au centre. Et lorsque je regarde le dynamisme des villes d’Europe occidentale et de l’Amérique du Nord – je ne parle même pas d’Asie du Sud-Est, eh bien, j’en arrive à la conclusion que l’Afrique est relativement sous-peuplée.

Et déférence gardée envers toutes les agences statistiques du monde et au sérieux de leurs enquêtes, je me pencherai modestement et assez paresseusement sur Wikipédia pour déterminer, si mon intuition m’a induit en erreur.

Ma méthode est simple : déterminer à l’aide d’un tableau basique le nombre d’habitants dans chaque continent, en donner la superficie et d’en déterminer la densité. Pour rappel, la densité est le rapport entre le nombre d’habitants et la superficie d’un territoire donnée. 

De ce tableau, il ressort sans surprise que l’Asie est le continent le plus peuplé avec une densité de 99 habitants au kilomètre carré. Mais le plus important est que l’Asie est suivi de l’Europe qui enregistre une densité de 73. Près de deux fois plus que celle de l’Afrique qui se classe 3e devant l’Amérique et l’Océanie.

Mais cette place de l’Afrique est-elle encore trop généreuse lorsqu’on sait qu’en Amérique, il existe une vraie césure entre l’Amérique du nord et l’Amérique du sud. Au nord, les Etats-Unis enregistrent une densité de 33 habitants au kilomètre carré.


En matière de surpopulation, il faut comparer les choses comparables

Les détracteurs du «ventre des Africaines » ont d’autres arguments. Ils pointent précisément le taux de fécondité. Il les effraie. 7 à 8 enfants par femme, dit M. Macron. Un chiffre invérifiable puisque le record du taux de fécondité est détenu par le Niger et il est de six (6) enfants par femme. Un chiffre qu’il faut mettre en contexte. Le Niger, c’est 20 millions d’habitants pour 1,2 million de km². Avec une densité de 16,38 habitants au kilomètre carré, Niamey n’a pas de leçon de surpopulation à recevoir de la France qui enrégistre une densité de 98,8 habitants/km² !Et puis pour finir, j’en vois qui, gênés, commencent à dire qu’il faut comparer les choses comparables ? Je suis d’accord avec vous. Arrêtez de comparer l’Afrique aux autres continents, à vouloir lui trouver une bonne manière d’être, une civilisation qui ne serait pas un défi, une histoire dans laquelle elle ne serait pas entrée, une fécondité qui serait trop débridée… L’Afrique a le droit de commettre ses propres erreurs, de trouver sa propre voie et parfois d’avoir raison de vivre sa vie.

 

En France, l’État s’inquiète régulièrement de la baisse de la natalité, mais en Afrique, M. Macron plaide pour la maîtrise de la fécondité. Comme si le fait que les femmes ont moins de bébés en France est de la faute des Africains. En fait, le double discours du président français, mais aussi celui plus froid des institutions financières internationales, ne visent qu’à continuer à maintenir l’image d’une Afrique surpeuplée alors que le continent est en fait un nain démographique qui ne risque pas de «submerger» l’Europe.


À propos des informations qui n’informent plus !

J’en avais déjà l’idée, mais c’est par un des plus purs hasards que j’ai trouvé le prétexte de ce billet. Il faut toujours un prétexte, semble-t-il.

Ce matin, après une éternité sans y aller, je suis retourné sur Twitter. Je ne sais pas pourquoi, mais je n’ai jamais été un utilisateur effréné de ce réseau social en particulier. Encore que je ne sois pas définitivement un fana des réseaux sociaux tout court.

Je me suis donc retrouvé sur Twitter et je me suis mis à parcourir le fil d’actualité. Une futilité par-ci. Un conseil bien placé par-là. une photo sur la Fête de l’Unité nationale du Cameroun qui joue les prolongations après les célébrations d’hier, un article de rfi.fr… Bref du classique.

C’est donc en revisitant les classiques que je suis tombé sur une information qui avait l’air d’être importante. Postée par L’Obs en ce dimanche matin, elle est nécessairement de la plus haute importance. Il faut comprendre, L’Obs, anciennement Le Nouvel Observateur, est un pilier de la presse magazine française. Peu importe si sa diffusion annuelle a baissé de 13 % en 2015, selon Wikipédia. Cela reste un fleuron.

Que diable nous annonce-t-on via un tweet signé L’Obs ? Eh bien c’est que la Corée du Sud se « tient prête » après un nouveau tir de missile nord-coréen… Et vous allez voir ce que vous allez voir, semblent souligner les guillemets !

Voilà donc le fait, la nouvelle, l’information. Il faut bien se résoudre à se dire que ces trois mots ressortent de la même signification aujourd’hui !

Parlons sérieusement. Qu’y a-t-il de bien nouveau dans l’information que nous assène L’Obs, qui reprend sans doute l’Agence France Presse ou une autre agence mondiale qui cultive le même sérieux ?

Sans sortir de Twitter et avec la volonté avouée de faire le moins d’efforts possibles, j’ai identifié une autre « information » du même type, sur le même sujet qui datait du 13 mai. Soit huit jours auparavant. Un lecteur beaucoup plus perspicace et patient pourrait trouver des centaines d’autres occurrences sur le même fait, avec les mêmes éléments de langage et la même fausse gravité.

 

Questions

Et la Corée du Nord n’est qu’un marronnier parmi tant d’autres. Famine et sécheresse en Somalie, migrants morts en méditérannée, la récession au Zimbabwe, bourdes plus ou moins vérifiées de Donald Trump, attentats non revendiqués de Boko Haram au nord-est du Nigeria, des Shebab en Somalie ou des Taliban en Afghanistan… La presse s’abreuve de ces informations qui tournent en boucle et qui n’informent plus ou très peu.

À quoi sert-il de revenir chaque jour sur des bilans toujours semblables des explosions à Maiduguri sans jamais savoir les détails des faits, sans jamais illustrer la détresse des familles, pointer les fausses annonces et alerter sur les manipulations de toutes sortes qu’implique la répétition stérile des faits ?

À qui profite ces cafouillages et ces bégaiements ? Est-ce aux journalistes et aux patrons de presse qui pêchent par paresse, pour les premiers, et par avarice pour les seconds ? Est-ce aux sources proches des milieux humanitaires toujours promptes à donner les détails sur les enfants qui meurent de faim et à demander sans sourciller des enveloppes pour alimenter leur budget ? Est-ce aux lecteurs-auditeurs-téléspectateurs-internautes qui trouvent là matière à alimenter leur curiosité et à se construire une conception fidèle de la réalité du monde ?

J’en suis venu à me demander si les gens de L’Obs – et pas seulement – se disent qu’ils continuent à informer avec de telles « informations ». J’ai brièvement pensé qu’ils n’y pensaient pas, puis qu’ils y pensaient et qu’ils n’en avaient rien à faire. Et puis je me suis regardé moi-même ! Difficile de se moquer quand on se rend compte qu’on marche soi-même de travers, qu’on se noie soi-même dans le même océan de médiocrité. J’ai rangé le petit sourire narquois qui commençait à poindre sur mon visage.


Si j’étais Français, je voterais Marine Le Pen !

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Il n’est un mystère pour personne que les percées de l’extrême droite constituent une lame de fond politique et idéologique.

Je  revois la tête incrédule de mon interlocuteur qui trônait au-dessus de sa nationalité. Il n’en revenait pas. Un Noir avoir de la sympathie pour le Front national ?! En voilà une idée ! Un parti antirépublicain et aux thèses ouvertement racistes et xénophobes. Il s’étonnait qu’un gars comme moi, qui par principe fait feu de tout bois pour défendre l’humanisme, les idéaux des Lumières, les mouvements tiers-mondistes anticoloniaux, fervent disciple d’Aimé Césaire, puisse réhabiliter le Front national, ne serait-ce que dans une hypothèse.

Comme on dit chez nous, ce cher monsieur – et tous ceux de sa condition avec lesquels j’ai pu discuter par la suite sur la question – avait raison d’avoir tort. En d’autres termes, si son diagnostic du fond de la pensée du Front national – ou mieux de l’Extrême droite – était sans doute fondé, j’ai eu l’impression qu’il n’a pas saisi qu’en réalité, ma thèse dans cette déclaration reste cohérente avec ma volonté d’assister à un rééquilibrage des rapports sociaux et des relations internationales.

La question que je pose avec cette hypothèse est la suivante : après l’éradication du communisme, l’Extrême droite actuelle n’est-elle pas – en Occident, le chemin le plus court pour pousser à un rééquilibrage des rapports de forces sur le plan national et international ? Le triomphe à venir et tout cas provisoire du conservatisme n’est-il pas le nouvel anticonformisme ?

Cette question m’a beaucoup préoccupé lors de la dernière élection présidentielle. Sans en être un partisan, j’avais prédit la victoire de Donald Trump. Il faut dire que je n’ai pas boudé le plaisir de le voir prendre le dessus sur Hillary Clinton. L’ancienne première dame représentait justement le conformisme ambiant, le statu quo libéral en vigueur de la mondialisation économique et culturelle poussée dans ses derniers retranchements.

Pas singulièrement que Donald Trump ait les moyens ni la volonté de changer radicalement la politique américaine, mais son élection aura été un signal nécessaire pour pousser à la réflexion ceux qui s’intéressent à la marche du monde.

Effectivement, les questions se sont posées dans les médias. Il y a fort à espérer qu’au-delà de la posture idéologique qu’ont prise certaines institutions universitaires contre Trump, des pistes de réflexions satisfaisantes seront déblayées.

 

Pièges idéologiques

Il n’est un mystère pour personne que les percées de l’extrême droite en Europe et de cette droite dure aux États-Unis constituent une lame de fond politique et idéologique. La plupart des professionnels de la politique sont pris au piège de leurs propres montages politiques, économiques et culturels. Ils s’asseyent entre eux et se disent en pensant à leur confort personnel : « tiens la société a besoin d’évoluer ! ». Ils font la politique de ce que leurs administrés devraient penser au lieu d’appliquer le consensus qui se dégage du corps social. Ils feignent d’oublier qu’une loi n’a pas pour objectif de changer le monde, mais de le codifier. Mais qu’importe ? On autorise pêle-mêle l’assurance-maladie/chômage universel, le mariage entre personnes du même sexe, la procréation pour autrui, la déchéance de nationalité, la régularisation des sans-papiers, etc.  Du bon et du douteux donc !

À l’international, sans qu’il y ait un quelconque prétexte, les mêmes font le pari qu’il faut garantir la puissance de l’État et lutter pour la préservation de la démocratie. De grandes idées qui permettent de mettre les pays du tiers-monde à feu et à sang, d’affaiblir les États et d’ouvrir la voie aux multinationales afin qu’elles pillent les ressources naturelles à l’abri des regards indiscrets. Le cas de la Libye est affligeant d’arrogance et de bêtise. Une belle idée serait d’envoyer Sarkozy, Obama, Hillary Clinton, l’Émir du Qatar et leur valet sénégalais Abdoulaye Wade en vacances dans la démocratie libyenne qu’ils ont contribué à construire.

Les politiciens professionnels occidentaux sont passés maîtres de la mise en œuvre d’idées créées de toute pièce. La politique n’est plus une responsabilité, une charge, c’est un espace de jouissances et de réjouissances. Bien qu’ils n’aient été mandatés par personne, ils n’ont aucune gêne à agir au nom de tous ! François Hollande a quand même pu en vouloir à Barack Obama et à David Cameron de l’avoir abandonné alors qu’il était prêt à lancer une attaque sur la Syrie. Ces deux hommes – pas franchement les plus recommandables – ont commis un crime aux yeux du président français : avoir compris qu’ils n’auraient jamais eu l’aval de leurs parlements respectifs. Le même Cameron a été passé à la moulinette pour avoir tenu un référendum qui a conduit au Brexit. Décidément, un empêcheur de tourner en rond s’était infiltré dans le club des gentlemen !

Et quand un Français qui aura vécu toute sa vie en France et qui par un hasard de l’histoire se retrouve dans un pays où la France fait la pluie et le beau temps – disons le Cameroun. Il s’étonne d’être traité comme le pillard, un voleur, un rapace. Il s’étonne et à raison. Personnellement, il n’a jamais volé personne, il n’a jamais pillé personne. Personnellement ! Mais au Cameroun on lui tient rigueur pour des actes qu’il n’a pas posés, sur lesquels il n’est pas informé et pour lesquels ses élus travaillent afin que « ce qui se passe en Afrique reste en Afrique ».

Mais avant de constater que les Camerounais ne l’aiment pas trop, notre Français s’est déjà, à titre personnel, demandé pourquoi son pays intéresse autant les Africains. Il s’est déjà étonné de voir les Africains débarquer par vagues dans son pays malgré les dangers de l’immigration. Que viennent-ils chercher, s’inquiète-t-il ? Pourquoi l’État ne peut pas se permettre de fermer complètement les frontières et de rapatrier tous ces quidams ?

 

La roue de l’histoire tourne

Les antécédents sont trop simples à expliquer : ces jeunes gens viennent de pays ravagés par des guerres absurdes alimentées par une industrie de l’armement soutenue par les politiques et financés par les multinationales privées présentées comme les joyaux de la couronne de la République. Ils viennent de pays où rien n’explique la pauvreté dans laquelle croupissent les masses alors qu’une infime partie de l’élite mène un train de vie princier entourée d’une ribambelle d’expatriés spécialistes de la captation rapace. Sont-ce les politiciens destinataires de valises affrétées par ces mêmes groupes qui répondront ?

Une constance s’affirme de plus en plus. Les masses électorales confrontées à une crise identitaire profonde semblent s’être réveillées de la léthargie dans laquelle elles ont sombré à la fin de la seconde guerre mondiale. L’allié numéro 1 des oligarchies libérales qui peuplent l’Europe et l’Amérique du Nord est pendant longtemps resté l’abstention. Mais la roue de l’histoire tourne. Le peuple présenté naguère comme une foule – forcément inconsciente – est de retour dans l’arène politique.

L’arrivée de l’extrême-droite diabolisée signale donc le retour d’une classe politique qui représente ce que pensent effectivement les Français. C’est un anticonformisme ! Si les citoyens français, américains, allemands, autrichiens, etc. sont effectivement racistes et xénophobes, c’est tant mieux. Cela se saurait désormais et tout le monde agira dès lors en connaissance de conséquences. Mieux vaut un démon que tu connais qu’un ange que tu ne connais pas. Si ces mêmes citoyens consentent à armer des navires afin de les envoyer aux quatre coins de la planète mener des guerres artificielles, ils comprendront pourquoi des centaines de milliers de réfugiés syriens débarquent chez eux à l’improviste. S’ils soutiennent le saccage systématique des tentatives de reconstruction culturelle des peuples écrasés par des décennies domination coloniale, au moins pourront-ils mettre un contexte au terrorisme politique nimbé de djihad qui menace leur sécurité.

Depuis l’époque dite des grandes découvertes qui a triomphalement débouchée sur la traite négrière, les peuples européens ont été mis entre parenthèses par la bourgeoisie, le grand capital. En France par exemple, la populace est brièvement sortie de sa torpeur en 1789. Cela a abouti à la première abolition de l’esclavage. Un bref passage à vide qui a été corrigé en une décennie avec l’arrivée de Napoléon Bonaparte.

Donc si Marine Le Pen me dit qu’elle est contre la mondialisation et qu’elle revendique la France pour les Français et la mise au pas des multinationales, je la suis et la comprends ; parce qu’in fine ce qu’elle demande pour les Français, elle n’a pas les moyens politiques et moraux de le refuser aux autres peuples de la planète.